sk8ter boi (ft. Grave)

Grave sortait de son cours de Médicomagie avec un profond mal de crâne. Cette matière était loin d'être sa favorite en plus de n'être absolument pas son fort. Il n'était pas forcément nul. Mais il n'était pas bon non plus. Ce qui, dans son esprit, équivalait à être nul. Grave était un bosseur dans l'âme, un acharné au travail mais de base il avait tout de même quelques facilités. C'était donc sûrement pour cette raison qu'il n'avait jamais rencontré une matière qui lui posait autant de problèmes ! Pourtant ce n'était pas faute d'essayer... Enfin. Il allait s'accorder une petite heure de repos pour une fois. Il allait rentrer au dortoir et tranquillement s'affaler dans son lit pour allégrement baver sur son oreiller avant de commencer à travailler.

C'est avec cette idée bien ancrée dans sa tête que Grave commença à se diriger vers la sortie du bâtiment pour rejoindre son dortoir, plongé dans ses pensées, songeant déjà à son lit et à la sieste quasi comatique (est-ce que ça se disait au moins ?) qu'il allait s'offrir. C'est alors qu'un grand vacarme retentit derrière lui attirant son attention. Grave le savait pourtant : vacarme était souvent synonyme d'emmerdes. Pourtant ça ne l'empêcha pas de se retourner. Ce fût comme un réflexe mais son mouvement fut sans aucun doute sa pire erreur de la journée car il vit un éclair d'une couleur indéfinie lui arriver droit dessus juste avant que... Aoutch.

Sur le coup la douleur le plia en deux. Purée c'était bas comme coup ça. Au milieu de la douleur cuisante qui avait, pour une fois, briser son masque d'impassibilité, il aperçut le responsable de sa douleur. Une planche de skate. Bon sang mais qui, QUI, faisait du skate en intérieur hein, qui ?! Pour une fois, Grave n'avait plus rien du jeune homme impassible en toute circonstance à l'expression figée et froide. Non non. Actuellement il était aussi faible que n'importe quel homme qui viendrait de se faire violemment frapper à l'entrejambe. Il était donc plié en deux, les genoux au sol et les larmes aux yeux, retenant le puissant cri de douleur de celui qui souffre le martyr. Entre ses yeux larmoyants il finit par apercevoir une silhouette dont les fringues rappelaient fortement celles portées par les skateurs quand il était gamin mais dont les traits étaient encore floues à cause des larmes de douleurs. Bon sang, il ne savait même pas encore qui c'était mais il le maudissait déjà très très très fort ce qui était parfaitement légitime de son point de vue. Il leva un doigt pour lui faire signe d'attendre un tout petit peu espérant qu'il n'allait pas juste profiter de sa faiblesse et se barrer. Non parce que pour le coup Grave aurait bien aimé avoir une ou deux explications. Après une petite minute il finit par se redresser même si bijoux de famille lui envoyaient toujours des éclairs de douleurs en signe de protestation suite au violent traitement qu'ils avaient subis... Et le blond ne pouvait que les comprendre. Il posa enfin son regard sur le jeune homme qu'il avait déjà croisé à quelques occasions même s'il ne connaissait pas son nom. Il avait déjà entendu dire que c'était un joyeux luron un peu inconscient mais Grave ne se fiait pas tellement aux bruits de couloirs. Il demanda d'un ton plus rude qu'il ne l'aurait voulu "-Je suppose que t'as une excellente explication et excuse ?"

Grave ressent la soudaine envie de lui envoyer sa propre planche dans la tronche. Pourtant il est plutôt du genre pacifiste, mais il n’aime pas qu’on se moque de lui ce qui arrive… Assez souvent pourtant. Et si d’habitude il passe son chemin en faisant semblant de n’avoir rien entendu, là il n’est franchement pas d’humeur à se laisser marcher dessus de cette façon déjà parce qu’il vient de se prendre sa planche dans les parties par la propre connerie de ce grand gamin et ensuite parce qu’il vient de passer une après-midi déjà bien merdique. Néanmoins il ne s’attend pas à ce que les paroles suivantes du brun soient encore pire. Est-ce que ce gars cherche à s’enfoncer ou bien est-ce que c’est ce genre d’imbéciles qui jouent des sales tours aux autres avant de faire les innocents ? Ça en a tout l’air et le blondinet ne peut s’empêcher de rétorquer « -Alors le karma viendra sans doute te rendre visite n’est-ce-pas ? Tu fais du mal aux autres et tu ne t’excuse pas on est pas si loin de la définition du connard non ? ».

Ça ne lui ressemble pas de répliquer ainsi et ça s’entend à sa voix quelque peu maladroite malgré l'impassibilité générale et à sa réplique pas vraiment recherchée. Et Grave ne peut que se demander pourquoi le gars en face lui parle d’Alcyone. Il connaît mal l’américain, pour pas dire qu’il ne le connaît pas en fait. Il ne sait que ce que Zaniah et Altaïr lui en dise de temps à autre mais ça ne va pas au-delà, et ils parlent rarement de leurs camarades respectifs. Et puis finalement Grave finit par percuter. Il est juste face à un de ces énièmes gars qui a pas grandi depuis ses quatorze ans, un énième qui boit les rumeurs comme si c’était de l’eau provenant de la fontaine de Jouvence, qui les écoute et en fait office de loi comme si c’était la parole d’un ancien dieu sacré et intouchable. Et Grave à envie de soupirer parce que c’est exactement ce genre de gars qui ne lui facilite pas la vie ni les relations sociales. Avec un soupçon de malchance en plus, il fait peut-être même parti de ceux qui propagent les rumeurs comme la peste sur le bas-peuple. Enfin… Ça fait treize ans que le jeune homme vit entouré de ces gens. On aurait pu penser qu’à force il ne ferait plus attention et que seuls les avis de ceux qu’il aime comptent pour lui. Foutue insécurité. Alors il préfère ne rien ajouter. De toute façon, il obtiendra sûrement rien d’un mec comme lui, c’est illusoire d’espérer des excuses et encore bien plus de penser qu’il va arrêter de faire le con dans les couloirs sur sa planche à roulettes. « -Je m’en fous d’Alcyone je le connais pas. Bref, essaie juste de pas tuer quelqu’un au passage. ». Il y a déjà assez de merdes de ce genre qui se passent en ce moment. Un brin d’humour noir pour enrichir la conversation et alimenter le moulin des rumeurs stupides, vraiment est-ce qu’il réfléchit parfois avant d’ouvrir la bouche ?

Grave part ramasser son sac qui à valdinguer dans un coin et l’époussette légèrement avant de le remettre sur son dos, passant cette fois les deux lanières sur ses épaules, histoire de ne pas le perdre une nouvelle fois, des fois que d’autres merdes t’attendent sur le trajet. Enfin, cette fois au moins tu te forces à sortir de tes pensées histoire d’être attentif à ce qui se passe et éviter les problèmes autant que faire ce peut, au moins tu peux remercier le skatteur qui t’a ramené sur terre pour ce rappel à la réalité.